Dossier

Le mythe de Sisyphe : cancer et chronicité

The myth of Sisyphus

¹ Centre Isala–Sénologie, CHU Saint-Pierre, 105, rue aux Laines, B-1000 Bruxelles, Belgique
² Clinique de psycho-oncologie, Institut Bordet, 1, rue Héger-Bordet, B-1000 Bruxelles, Belgique

^* e-mail : Nicolas_BEAULOYE@stpierre-bru.be
^** e-mail : francoise.daune@bordet.be

Reçu : 20 Décembre 2018
Accepté : 11 Février 2019

Résumé

De plus en plus, le cancer est considéré comme une maladie chronique avec ou sans phase aiguë, avec ou sans rémission. Une chronicité qui dans le discours des soignants, ou celui des patients, risque de banaliser, voire de faire taire l’expression de l’impact psychique du cancer et de ses traitements. Or, la chronicité ne peut que faire écran de la souffrance qui ne consiste pas seulement dans le poids de la maladie et de ses traitements, mais aussi dans le rythme qu’ils impriment à l’existence. Chronicité qui est ellemême source de souffrance. Cet article établit le parallèle entre le mythe de Sisyphe écrit par Camus et la condition, voire l’identité, du patient chronique atteint d’un cancer. Si l’ouvrage de Sisyphe n’est jamais terminé, celui du patient connaît une fin.

Abstract

Increasingly, cancer is being considered as a chronic disease with or without acute phase, with or without acute phase remission. A chronicity that in the discourse of caregivers, or that of patients, may trivialize or even silence the expression of the psychological impact of cancer and its treatments. However, chronicity can only shield us from suffering which does not consist only in the weight of the disease and its treatments, but also in the rhythm that they imprint on existence. Chronicity which is itself source of suffering. This article draws a parallel between the myth of Sisyphus written by Camus and the condition, or even the identity of the chronic cancer patient. If the Sisyphus’ work is never finished, the patient’s work Knows an end.